Observer l’orignal au Québec

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L’orignal (Alces alces) fait partie de ces espèces très emblématiques des forêts boréales québécoises. Une rencontre avec le plus grand cervidé du monde dans les couleurs automnales et les premiers froids matinaux de la Belle Province, ne laisse jamais indifférent. Sa silhouette est immense. Son panache parfois démesuré. Ses appels nocturnes dans les vallées, sortis d’un autre temps. Assurément, le caractère sauvage de l’automne québécois sans ces géants dans les brumes matinales des bords de lacs et autres recoins forestiers du Québec, ne serait pas le même.

Découvrez le géant des forêts québécoises

Observer un orignal, c’est rencontrer la placidité et le calme du gigantisme des forêts nord-américaines. Il existe sur ce territoire quatre sous-espèces. L’une vit dans les territoires sauvages de l’Alaska et du Yukon, une autre sur une vaste zone qui s’étend du Wyoming, de l’Idaho et du Montana vers l’Alberta et le sud de la Colombie-Britannique. Enfin, une troisième occupe le territoire canadien de l’est de la Colombie-Britannique à l’ouest de l’Ontario. Alces alces americana constitue la dernière et quatrième sous-espèce d’orignal en Amérique du Nord et se trouve au Canada sur les territoires situés à l’est de l’Ontario et, par conséquent, au Québec. Sur les 200 000 à 300 000 orignaux présents en Amérique du Nord, environ 70 000 se trouvent dans les forêts québécoises.

UN SYMBOLE DE LA FORÊT BORÉALE

L’animal, principalement actif le matin et au coucher du soleil, possède une apparence très caractéristique. Son pelage est brun foncé, parfois presque noir, et le dessous de son corps est plutôt grisâtre. Ses longues pattes lui permettent de se déplacer facilement dans l’eau profonde et les zones marécageuses. Sa hauteur à l’épaule peut atteindre 2 mètres. Ses pieds, composés de quatre sabots élargis et reliés par une membrane interdigitale, lui permettent de nager efficacement et de ne pas s’enfoncer dans les sols meubles comme les tourbières ou la neige profonde. À titre comparatif, cette morphologie lui permet de limiter sa charge à environ 420 g/cm² au lieu de 800 g/cm² comme pour le cheval par exemple. Herbivore et ruminant, il se nourrit principalement au cours de l’été de plantes aquatiques comme les racines de nénuphars, des potamots et de la vallisnérie, mais également d’herbes et de feuillage. À cette période de l’année, il consomme quotidiennement entre 20 et 25 kg de végétaux par jour. Au cours de l’hiver, son alimentation est principalement composée de branches d’arbres et d’arbustes comme l’érable à épis, l’érable de Pennsylvanie, le noisetier, le bouleau, le saule, le tremble et le sapin. Lorsque la nourriture se fait plus rare, il peut également s’alimenter de l’écorce des arbres.

Le mâle possède de très larges bois en partie plats, de morphologie unique chez les cervidés. Ce panache pousse et tombe chaque année aux alentours de janvier-février. La croissance annuelle de cette ramure spectaculaire qui peut peser jusqu’à 15 ou 20 kg et dépasser les 1,60 m de largeur pour les plus imposantes, explique en partie pourquoi les animaux recherchent les sels minéraux présents dans les plantes aquatiques au cours de l’été. Cependant, il est tout à fait possible de voir les femelles adopter les mêmes comportements pour combler leurs carences alimentaires hivernales. À ce titre, l’orignal est le seul cervidé capable de brouter les végétaux aquatiques la tête sous l’eau et jusqu’à plusieurs mètres de profondeur. Le poids des mâles varie en moyenne entre 450 et 500 kg à l’âge adulte. Le plus grand mâle observé à ce jour est un animal abattu en Alaska en 1897 et dont la hauteur à l’épaule était de 2,34 m pour un poids de 816 kg. La largeur de sa ramure était de 2 m. Gigantesque !

PLEINEMENT ACTIF DURANT L’AUTOMNE

À la période du rut, aux environs des deux dernières semaines de septembre, la femelle recherche activement un mâle. Elle émet des cris qui peuvent être entendus à plus de 3 km de distance. De son côté, le mâle établi un territoire et devient hargneux et agressif. Il gratte le sol avec ses pattes avant et fouette les branches de son panache. Peu de temps après l’accouplement, le mâle et la femelle retrouvent leur solitude. Après une gestation de 240 à 245 jours, la femelle met au monde un, voire deux petits à la fin du mois de mai ou au début de juin. À sa naissance et dès la première journée, le faon se lève et suit sa mère qui l’allaite. Au cours des premières semaines et mois de sa vie, le jeune est très vulnérable à la prédation du loup et de l’ours noir. Il commencera à brouter vers l’âge de 4 à 5 semaines, mais ne sera sevré qu’à l’automne. Au printemps suivant, avant de donner naissance à un autre petit, la femelle repoussera son jeune de l’année précédente qui prendra alors son autonomie. À un an et demi, un peu moins de la moitié des femelles, mais une majorité des mâles du même âge s’accouplent pour la première fois. Cependant, la période de fécondité maximale chez l’espèce se situe entre l’âge de 4 et 13 ans. Dans les zones préservées comme les parcs nationaux, un orignal peut vivre jusqu’à 15 ans environ.

Durant l’hiver, ils se regroupent en petits groupes de deux à huit individus en moyenne. Ils choisissent un boisé où ils trouvent des abris contre le vent et le froid et où ils tracent de nombreux sentiers leur donnant accès à de la nourriture et à des zones de repos. Ces rassemblements dans ces habitats propices portent le nom de « ravages ». Au cours de cette période, la prédation par les meutes de loups sur les adultes dans la force de l’âge qui sont ordinairement capables de les distancer au cours de l’été, devient bien plus efficace. Ainsi, au Québec, les densités d’orignaux atteignent leur maximum au sud du fleuve Saint-Laurent où il n’y a pas de loups, mais aussi grâce à la présence accrue d’essences forestières feuillues. Certaines régions de la Gaspésie connaissent les densités les plus fortes en Amérique du Nord, avec quatre à cinq orignaux aux 10 km² et dans certaines zones localisées, parfois au-delà. À titre comparatif, sur la côte nord, là où le loup est présent, la densité des orignaux y est en moyenne divisée par des facteurs de 2, 4 ou 6 même si là aussi, certaines régions connaissent des densités plus fortes. De manière générale, en prenant la direction du nord de la province, leur densité diminue graduellement avec la latitude et l’apparition d’essences forestières plus nordiques dans leur habitat, dont le potentiel nutritif est plus limité.

En savoir plus sur l’orignal

Vous l’avez compris, voyager au Québec, c’est parcourir un haut lieu de l’observation de l’orignal en Amérique du Nord. De nombreuses organisations vous permettent d’aller le découvrir dans son habitat naturel de façon indépendante ou accompagné d’un guide naturaliste chevronné. Les hauts lieux de ses activités sont le parc national de la Gaspésie, la réserve faunique de Matane ainsi que, plus près de la capitale nationale, la forêt Montmorency.

Vous êtes passionné(e) de faune sauvage ?
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Benjamin Dy

Benjamin Dy est biologiste, photographe de faune sauvage et écrivain naturaliste. Ce franco-canadien de 35 ans vit au Québec depuis presque une quinzaine d’années et n’a de cesse de parcourir son magnifique territoire à la recherche d’images et de reportages. Avant tout attiré par les espaces sauvages, ces régions naturelles de prédilections sont celles des Appalaches, des Laurentides et du plateau de la Basse Côte Nord avec sa superbe Minganie. Ses ultimes destinations photographiques québécoises sont les paysages de bout du monde du Nunavik où il mène régulièrement des expéditions pour ses projets personnels. Pour lui, les espaces sauvages du Québec et du monde entier sont une source d’épanouissement et de découverte sans limites.


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